6È « PHOTO BRUSSELS FESTIVAL », « IN THE SHADOW OF TREES », AU « HANGAR », À IXELLES, JUSQU’AU 26 MARS
© « Hangar Photo Art Center »
A Ixelles, dans le cadre du 6è « Photo Brussels Festival », retrouvons-nous sur les trois étages du « Hangar Photo Art Center », jusqu’au samedi 26 mars, pour découvrir« In the Shadow of Trees » (« A l’Ombre des Arbres »), avec des photogaphies, qui, nous emmènent du baobab de Madagascar (« Baobabs Citernes »/2019), vu par Pascal Maitre (France/°1935) juqu’à une vision de l’Amazonie (« Seeds of Resistance »/2018-2021), due à Pablo Albarenga (Uruguay/°1990), en passant par une forêt couvrant six pays d’Afrique Centrale (« Paradis perdu »/2017-2021) parcourue avec passion par Eric Guglielmi (France/1970-2021) ou encore les plus vieux arbres du monde (« Ancient Trees »/1999-2013) recherchés par Beth Moon (Etats-Unis/°1956).

« Paola Wayuu »/2019 © Pablo Albarenga
« Paradis perdu » © Eric Guglielmi
Concernant le travail de ce dernier, l’anthropologue et ethnologue britannique Jane Goodall (°Hampstead/1934) écrivit : « Les images de Beth Moon capturent la puissance et le mystère des derniers vieux arbres dans le monde. Ces vénérables sentinelles de la forêt sont parmi les plus anciens êtres vivants de la planète, et il est de la plus haute importance que nous fassions tout ce qui est en notre pouvoir pour assurer leur survie. »
:format(jpg)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/DXNA6TN64RGSZOUKZPYTQHWMFU.jpg)
« Ancient Treees » © Beth Moon
Pascal Maître, quant à lui, nous apprend que les baobabs – appelés « mères de la forêt », par les Malgaches -, au bois tendre et spongieux, mesurent plus de 20 mètres de circonférence et 30 mètres de hauteur, leur poids égalant celui d’un avion « Airbus A380 ». A Madagascar, leurs troncs sont creusés par les autochtones et remplis d’eau, afin de servir de citernes pour leurs villages.
«Baobabs Citernes » © P. Maitre

« Baobabs Citernes » © P. Maitre
Delphine Dumont, directrice de « Hangar » et fondatrice du « Photo Brussels Festival » nous précise, quant au procédé de la « fabrication de l’image » : « (Cet) artiste considère chacune des étapes jusqu’au tirage final comme aussi importante que la capture de l’image elle-même. En optant pour la technique de tirage la plus lente, le procédé platine-palladium, elle aborde la notion de la survie, non seulement celle des arbres, mais ausi celle de la photographie. »
De son côté, travaillant à Montevideo et à Sao Paulo, Pablo Albarenga s’attache aux habitants de la forêt amazonienne … Aux survivants, pourrions-nous écrire, puisqu’en 2017, 201 défenseurs de l’environnement ont perdu la vie en tentant de protéger leur terre des ravages de l’exploitation minière et forestière ou de l’agro-industrie. Au Brésil, 57 personnes ont été tuées … Aussi, cette série nous propose 14 portraits d’indigènes et/ou activistes, profondément engagés dans la défense de la forêt amazonienne. Saisissant leur « cri de désespoir », ces derniers nous sont présentés allongés, tels des troncs coupés …
Visuel du court-métrage « Forest on Location » © Persijn Broersen & Margit Lukas
Aux côtés de ces centaines de photographies, un film – « Forest on Location » (2018/12′) – de Persijn Broersen (Pays-Bas/°1974) et Margit Lukas (Pays-Bas/°1973), nous emmène entre la Biélorussie et la Pologne, au sein de l’une des plus anciennes forêts primaires d’Europe, la Bialowieza, qui nous est proposée virtuellement, grâce à une technique appelée « photogamétrie ». En outre, ce décor fascinant sert de toile de fond à la performance du chanteur d’opéra iranien Sharam Yazdani, interprétant une version de « Nature Boy », faisant écho au jazzman américain Nat King Cole (1919-1965).
Retour à la photo, pour signaler que le« Hangar » avait lancé un appel à projets, sur l’importance de l’arbre dans notre paysage, destiné aux photographes européens, un Jury ayant retenu trois projets, qui nous sont présentés, au 2è étage de cet accueillant « Photo Art Center ».
Incluant ces trois projets, vingt séries de photographies, réalisées par 23 artistes, nous sont proposées, les photographes non encore cités étant :
** Terje Abusdal (Norvège/°1978) : « Slash Burn » (2017), à la rencontre des « Forest Finns » (Finlandais de la Forêt), (sur)vivant entre la Norvège et la Suède, dans une zone nommée « Finnskogen » (Bois des Finlandais).
« Slash & Burn #9 » © Terje Abusdal
** Mustapha Azerual (France-Maroc/°1979) : « Résurgence » (2010-2015), une série qui croise le procédé de la gomme bichromatée avec celui de la numérisation.

« Résurgence » © M. Azerual
** Olaf Otto Becker (Allemagne/°1959) : « Reading the Landscape » (2008-2014), avec la nature intacte, la nature ravagée et la nature artificielle des forêts primaires de Malaisie et d’Indonésie, sachant que dans ce dernier pays, durant les 30 dernières années, 90% des forêts ont été détruites, remplacées par de la monoculture.
« Primary Forest 18, Roots, Malaysia »/2012 © Olaf Otto Becker
** Jelle Brandt Corstius (Pays-Bas/°1978) & Jeroen Toirkens (Pays-Bas/°1971) : « Borealis » (2016-2020), un projet documentaire sur les habitants des forêts boréales, à travers 8 histoires, concernant 6 pays d’Amérique du Nord, d’Asie et d’Europe.

« Borealis » © J.-B. Corstius & J. Toirkens
** Edward Burtynsky (Canada/°1955) : « Natural Order » (2020), une contemplation d’une myriade de chaos apparents, en un lieu nommé Grey County, en Ontario, alors que l’artiste était confiné, durant le printemps 2020.
« Natural Order #22 » (Grey County,Ontario)/2020 © Edward Burtynsky © « Flowers Gallery »/London
** Mitch Epstein (Etats-Unis/°1952) : « New York Arbor » (2011-2012), une série de 42 tirages, dont trois photos monumentales sont exposées, témoignages de la relation symbiotique liant les habitants de la « Big Apple » à leurs arbres, Mitch Epstein écrivant : « A force de photographier les arbres de la ville, je me suis mis à considérer la ville comme une forêt, la société et l’architecture étant peu à peu éclipsées par la nature. J’ai développé une perception différente de l’espace urbain, habituellement saisi comme articulé autour de l’humain, et les arbres sont devenus les personnages principaux de la ville. » Quant à l’avis d’Astrid Ullens de Schooten Wettnall, présidente de la « Fondation A. Stichting » : « C’est un hymne à la vie, à l’espoir, à la grandeur du temps qui passe et une ode, en noir et blanc, à la nature. »

« New York Arbor » © Mitch Epstein
** Arguine Escandon (Espagne/°1979) & Yann Gross (Suisse/°1981) : « Aya » (« fantôme », « âme », en quichua/2016-2019), un projet « pour se débarasser des images d’eldorado, de conquiqtadors, de ‘sauvages’ « , réalisé à partir d’une ancienne carte postale, montrant, au Pérou,le photographe-explorateur allemand Charles Kroehle (1876-1902), posant fièrement à l’arrière d’un crocodile mort, entouré d’Indigènes amazoniens … Un choc des représentations de l’Amazonie, à un siècle d’écart. « Tandis que sur la carte postale, les sujets posaient sans arrière-pensée devant la dépouille d’un crocodile, aujourd’hui, même les images les plus anodines (de l’Amazonie/ndlr) sont travaillées par le se sentiment de la perte annoncée. L’Amazonie disparaît. Et ‘Aya’ anticipe déjà sa survie par l’esprit« , écrit le duo de photographes.

Charles Kroehle & Indigènes amazoniens (carte postale)
« Aya » © Arguine Escandon & Yann Gross
** Nicolai Howalt (Danemark/°1970) : « Old Tjikko » (2016-), un épicéa se trouvant en Suède, dans le Comté de Dalécarlie, au sein du« Parc National Fulufjället », sa datation au carbonne 14 montrant que ses racines sont âgées de … 9.950 ans. Notons que cette série a été développée sur plusieurs types de vieux papiers, certains datant des années ’40, « Old Tjikko » apparaîssant ainsi via diverses variations esthétiques, offrant une certaine vision du temps qui passe.

« Old Tjikko » © N. Howalt
** King Jungman (Corée du Sud/°1954) : « Street of Broken Hearts » (2008-2017), une série de 54 photographies, en grand format, imprimées sur du papier de riz coréen, dont quelques exemplaires nous accueillent à l’entrée de l’exposition, ces arbres – cassés, disloqués par les citadins ou par le vent – étant plantés dans une ruelle de Séoul.

House of Summer »/ Série « Street of Broken Hearts » © Kim Jungman
** Jaakko Kahilaniemi (Finlande/°1989) : « 100 Hectares of Understanding » (2015-), une forêt finlandaise de 100 hectares, dont il a hérité, réalisant ce que représente un massif forestier et ses différentes étapes de vie, tentant de créer de nouvelles manières de penser, d’expérimenter et de ressentir la forêt.
« Next possible Victims »/2018 © Jaakko Kahilaniemi
** Enrique Ramirez (Colombie/°1979) : « « Calais » (2009), des photoraphies, prises à Sangatte, après la destruction du centre d’accueil de migrants, ce photographe-cinéaste nous proposant, également, deux courts-métrages : « Alerce » (2017), un voyage poétique, vertical et vivant, en Amérique du Sud ; et « Jardins migratoires » (2021), un récit poétique, qui interroge le lien entre le besoin d’un ancrage à sa terre et l’expérience du déracinement, résultat d’un travail de réécritutre créative entre l’artiste et les habitants d’Arles, durant le second confinement, consécutif à la « Covid-19 », ce film étant une production de l’ « ENSP » (« Ecole Nationale Supérieure de Photographie ») d’Arles, dans le cadre d’une résidence de l’artiste colombien avec les étudiants.
« Jardins migratoires »/2021 © Enrique Ramirez
** Bruno V. Roels (Belgique/°1976) : « A Palm Tree is a Palm Tree », « A Guide to Cherry Blossom » & « Looking to Paradise », un travail sur le palmier, qui n’est pas seulement un exercice visuel, mais, également, un travail aux fortes ramifications sémantiques, philosophiques, voire anthropologiques, un palmier à Monaco ne racontant pas la même histoire qu’un autre, planté à Fallujah, une ville irakienne, ravagée par la guerre. Pour le Gantois, pas de tirage parfait, mais des variations d’un seul négatif.
« A Palm Tree is a Palm Tree » © Bruno V. Roels
N’oublions pas les trois lauréats de l’appel à projets, exposés au 2è étage :
** Benjamin Deroche (France/°1981) : « Surnature » (2017-) & « La Lumière du Loup » (2017-2020), ce second projet – amorcé durant une résidence d’artiste à l’ « Abbaye de Jumièges », en Normandie– ayant permis à ce photographe de vivre en un lieu de thérapie pour le corps et l’esprit, à savoir la forêt, ceci en toutes saisons, lui permettant, ainsi, de comprendre l’évolution des lumières et des couleurs, cette série relevant d’une authentique démarche spirituelle.
« La Lumière du Loup » © Benjamin Deroche
** Yutao Gao (Canada/°1988) : « Peach Blossom Beam » (2021), une rencontre avec un pêcher, planté au sommet d’une montagne, qu’il avait gravi suite au décès de son grand père. Portant un regard sur sa propre existence, il nous offre, d’une part, l’image des fleurs de l’arbre fruitier, et, d’autre part, les traces abstraites et tordues du temps. Cet arbre estclair, mais aussi brumeux, comme des souvenirs. Il incarne le temps qui passe, le sens rituel de la vie et de la mort.
** Kira Krasz (Hongrie/°1995) : « A living Sense of Home » (2021), une série de photos-collages, par laquelle ce photographe hongrois crée des parallèles entre l’architecture e nos maisons, la structures des arbres et l’atmospère que ceux-ci apportent à nos vies. « Les forêts meublent la terre. Les arbres meublent les forêts. Je meuble les arbres », écrit-il.
« A Living Sense of Home »/2021 © Kíra Krász
« On ne peut aborder la thématique de la forêt et de la biodiversité sans engager des pratiques plus vertueuses de la photographie », nous confie Delphine Dumont.
© « Hangar Photo Art Center »
En page 153 du catalogue, le critique d’art Christian Caujolle – directeur artistique, en 1997, des « Rencontres internationales de la Photographie d’Arles » et créateur, en 2008, au Cambodge, du « Festival Photo Phnom Penh » – nous rapporte quelques proverbes : « L’arbre qui tombe fait plus de bruit que la forêt qui pousse » ou encore « Si un petit arbre est sorti de te terre sous un baobab, il meurt arbrisseau » (Afrique), « L’arbre élevé attire le vent » et « Sur un même arbre ne pousse jamais deux sortes de fleurs » (Chine), « Un arbre s’appuie sur les arbres, un homme sur les hommes » (Serbie) , « Ne coupe pas l’arbre qui te donne de l’ombre » (Arabie saoudite), « Reste à côté de l’arbre et prend les fruits qui tombent » (Pays-Bas), « Les arbres les plus vieux ont les fruits les plus doux » (France), …
… Et de citer l’écrivain et poète chilien Pablo Neruda (Ricardo Eliécer Neftalí Reyes-Basoalto/1904-973) : « Etre arbre. Un arbre ailé. Dénuder ses racines dans la terre puissante et les livrer au sol et quand, autour de nous, tout sera bien plus vaste, ouvrir en grand nos ailes et nous mettre à voler. »
© « Hangar Photo Art Center »
Sur ces bons mots, nous ne pouvons que vous conseiller, au coeur d’une capitale bruyante, aux nombreux édifices de béton, de profiter des arbres et forêts présentés dans le calme du « Hangar, Photo Art Center ».
© « Photo Brussels Festival »
Ouverture : jusqu’au samedi 26 mars, d mardi au samedi, de 12h à 18h. Prix d’entrée : 7€ (5€, de 13 à 24 ans, dès 65 ans et pour les demandeurs d’emploi / 0€, pour les moins de 13 ans. Réservations en ligne : obligatoires pour les samedis, recommandées pour les autres jours. Obligations sanitaires : port d’un masque buccal (dès 12 ans), présentation de son « Covid Safe Ticket » (dès 16 ans) et d’une pièce d’identité. Contacts : contact@hangar.art ou 02/538.00.85. Site web : http://www.hangart.art.
© « Irene Laub Gallery » : « Souvenirs » © KStijn Colle
Soulignons que ce 6è « Photo Brussels Festival » nous propose des expositions dans 36 autres lieux, incluant, notamment, le « Korean Culture Center » (« Group Show »), la « Fondation A. Stichting » (« The Street Lady », par Helen Levitt), le « Musée Royal de l’Armée et de l’Histoire militaire » (« Covid 19 », par Jérusalem Piérard), « Contretype » (« Empire hydraulique », par Cyril Albrecht, & « Sludge, Steel and Silver », par Lucas Leffler),« Argos » (« Organic Music Societies », par Don & Moki Cherry, & « Minutenfilme #3 », par Alexander Kluge), l’« Espace Magh » (« Les Oubliés dela Médina », par Mehdi Ben Khouja), l’ « Irene Laub Gallery » (« Souvenirs », par Stijn Colle),ou encore la « Galerie Nathalie Obadia » (« Calder, Richier, Schlegel, Székely », par Agnès Varda {1928-2019}).
© « Gal. N. Obadia » : « Calder, Richier, Schlegel, Székely »© A. Varda
Lien d’accès à la programmation complète, incluant une carte géographique situant ces 36 lieux et le « Hangar » : https://www.hangar.art/photobrusselsfestival-festivaltour-2.
Yves Calbert.
More Stories
28È « BRUSSELS SHORT FILM FESTIVAL », DU 24 AVRIL AU 03 MAI
« FIESTA » : PARADE ET EXPOSITIONS DE « LILLE 3000 », DÈS LE 26 AVRIL
« LES JOURS DE MON ABANDON », AU « THÉÂTRE DE NAMUR », DU 17 AU 19 AVRIL